Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Légende : Alexander Vencel

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Par conan
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Gardien durant 6 ans du temple strasbourgeois, Vencel fut le véritable chouchou du public de la Meinau. Portrait de cette légende des temps modernes.

Difficile de nier l'influence de la lignée paternelle pour la carrière d'Alexander Vencel II. Peu de gens savent en effet que Alexander Vencel I, son papa, fut gardien de but. Un excellent gardien de but même puisqu'il porta la tunique de l'équipe de Tchécoslovaquie lors du Mondial mexicain de 1970. Il remplaça le légendaire Viktor, un Viktor rendu fou par les coups de génie de Pelé et ses amis lors d'un fabuleux Brésil-Tchécoslovaquie. Alexander père fit de son mieux, mais il ne put empêcher l'élimination de son pays qui eut le malheur de tomber sur un groupe très relevé aux cotés de l'Angleterre, du Brésil et de la Roumanie. Alexander fils n'avait alors que 3 ans mais on ne peut que supposer que les exploits paternels furent pour beaucoup dans son destin.

Né un an avant le sanglant printemps de Prague, Alexander Vencel passa sa jeunesse dans une Tchécoslovaquie communiste ou les libertés étaient quasiment inexistantes. A cette époque, on jouait au football par passion et pour le plaisir, pas pour l'argent. Les richesses de l'Europe de l'Ouest, seules les plus grands y avaient droit, et encore seulement en fin de carrière... Ceci peut expliquer en partie les caractères si humbles et si travailleurs des footballeurs de l'ex bloc de l'Est, caractère qui définit bien l'homme Vencel. Beaucoup d'entres eux devaient s'entraîner dans leurs clubs après 8 heures d'usine. Alex, lui, fut mieux loti grâce à des études longues qui lui permit d'obtenir un diplôme d'ingénieur. Parlant en outre 5 langues, il fait incontestablement partie de ces athlètes à la tête bien faite.

Le football tchécoslovaque fut l'un des plus performants d'Europe de l'Est, le mélange entre la rigoureuse force tchéque et la technique un peu folle slovaque fit souvent des dégâts dans les grandes compétitions internationales. La Tchécoslovaquie fut par deux fois finaliste de la Coupe du Monde, en 1934 et 1962. Si Josef Masopust, un brillant meneur de jeu, fut ballon d'or dans les années 60, les héros locaux furent très souvent des gardiens de buts : Planicka dans les années 30, Schroiff en 1962 et Viktor dans les années 70. Autant de modèles pour Alex Vencel lors de ses débuts au Slovan Bratislava, bastion d'un football slovaque si brillant du temps de la Tchécoslovaquie et composant l'essentiel de l'équipe nationale lors de l'Euro 76, remporté à la surprise général au nez et à la barbe de joueurs ouest allemands considérés alors comme invincibles.

Brillant au Slovan, Vencel serait sans doute resté toute sa carrière dans l'anonymat si l'Histoire n'en avait pas décidé autrement. Le mur tombe en 1989 et la Tchécoslovaque n'existe plus en 1993. Le divorce à l'amiable entre la République Tchéque et la Slovaquie eu des conséquences désastreuses pour le football de ce deuxième état. Si la République tchéque constitue aujourd'hui une place forte du football mondial, la Slovaquie est totalement inexistante. Il est clair que le championnat slovaque est trop petit pour un gardien de la trempe de Vencel, qui a désormais le loisir d'exercer son talent à l'Ouest.

Ce fut Max Hild qui, le premier, flaira la bonne affaire et obtint le prêt de ce grand gaillard aux allures un peu gauche, au crane commençant à se dégarnir, portant sur le terrain un pantalon de survêtement noir. Vencel (recruté suite à la vision de cassettes vidéos!) avait pour délicate mission de remplacer le Suisse Joël Corminboeuf qui avait enthousiasmé le public alsacien. Pas facile pour un illustre inconnu et ses débuts au Racing furent relativement quelconques. Vencel était un gardien relativement sûr, notamment dans les airs, mais discret et très rarement brillant. Malgré quelques arrêts réflexes véritablement étonnants aperçus si et là, il n'était jamais mis en avant lorsque l'on parlait de ce Racing si irrégulier mais capables des performances les plus brillantes comme en Coupe de France 1995 ou en Coupe de l'UEFA à l'automne de la même année. Les habitués des terrains d'entraînement étaient néanmoins unanimes pour souligner l'extrême gentillesse du Slovaque à l'accent guttural.

Le tournant de la carrière de Vencel eut lieu lors de la saison 96/97. L'arrivée de Michel Etorre au poste d'entraîneur des gardiens de but y fut sans doute pour quelque chose. Transfiguré, Vencel a franchi cette année là un immense pallier et devint l'un des leaders de ce Racing si brillant en Championnat. Le 12 avril 1997 fut l'un des sommets de sa carrière. Blessé et plus qu'incertain pour la finale de la Coupe de la Ligue, il fut aligné à la dernière minute. Auteur d'un match impeccable, il fut l'un des héros de l'interminable série de tirs aux buts qui désigna le Racing vainqueur. Il y avait 18 ans que le Racing n'avait pas emporté une compétition...

La campagne UEFA fut également l'un des plus grands moments de sa carrière. Anfield Road fut littéralement sous son charme et applaudit à tout rompre celui qui élimina quasiment à lui tout seul les Reds. C'est lors de cette rencontre qu'il effectua sans doute la plus belle parade de sa carrière, une envolée absolument merveilleuse sur un lob de Fowler. Face à l'Inter à Guiseppe Meazza, bis repetita ou presque. Face à des Milanais déchaînés et un arbitre bulgare ne voulant franchement pas que du bien aux Strasbourgeois, Vencel multiplia les arrêts de grande classe et se paya même le luxe d'arrêter un penalty. Mais Ronaldo et les siens étaient trop forts. Si Vencel évita au Racing une humiliation mémorable, il ne put rien faire pour éviter le 3-0 éliminatoire. Le triste paradoxe du gardien de but qui voit son équipe éliminée après avoir réalisé un match exceptionnel. Les prestations de Vencel firent néanmoins parler aux quatre coins de l'Europe et il fut même à une époque question de sa venue dans des grands clubs de série A.

Alex Vencel accéda définitivement au statut de star du championnat de France, il fut malheureusement le seul rayon de soleil d'un bien triste Racing, englué par la grâce de Patrick Proisy dans les limbes de la médiocrité. Comme un symbole, ce fut Vencel, gardien de but d'une équipe insipide qui ne joua strictement aucun rôle lors de la saison 98/99 qui fut désigné par le magazine France Football comme meilleur gardien de but du championnat. En ces tristes années de vaches maigres, le Racing disposait dans ses rangs d'une véritable vedette. Ses dirigeants trouvèrent pourtant le moyen de ne pas l'honorer et ne pas lui remettre son trophée à la Meinau, et pour cause, il n'était même plus titulaire ! Claude Le Roy, en grand visionnaire, estima de son propre aveu que Vencel n'était pas un bon gardien ! Lors d'une rencontre à Montpellier, Alex fut touché à 10 minutes de la fin du match. Plutôt que de sortir, il fut porté par sa fougue, serra les dents et resta sur le terrain. La blessure, plus sérieuse que prévue, l'écarta des terrains quelques semaines. Thierry Debès fut intronisé gardien numéro un et Vencel ne réapparut plus jamais sous le maillot Strasbourgeois. Ce fut là l'une des erreurs les plus incroyables de Claude Le Roy qui n'en fut pourtant pas avare. Le public n'allait jamais admettre la mise au placard de son chouchou. Circonstance aggravante, que ce soit Thierry Debès, Christophe Eggimann, José Luis Chilavert, Vincent Fernandez, Nicolas Bonis, Richard Dutruel ou Remy Vercoutre, personne n'a fait oublier le grand Slovaque qui brille désormais au Havre.

Même à un age canonique (il vient de fêter ses 38 ans), Vencel tient toujours la baraque, et fut même désigné meilleur gardien de L2 sous le maillot normand ! Dirigeants et supporters havrais se demandent encore comment le Racing a pu pousser vers la sortie une telle personnalité... Quoi qu'il en soit, Strasbourg n'a pas oublié Alex. Pour preuve, cet émouvant Racing-Le Havre en 2002, dernier match de D2. La Meinau reçut le gardien havrais sous un tonnerre d'applaudissement, son nom fut scandé et des banderoles à sa gloire déployées. Alex ne put retenir ses larmes tant l'émotion fut grande pour lui... Quoiqu'il en soit, Alexander Vencel restera dans la mémoire collective comme l'un des plus grands et des plus attachants joueurs qui aient porté le maillot du Racing. Hommage devait lui être rendu, voilà qui est fait...

conan

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