Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Les tribus des tribunes

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Freud s'est longtemps trifouillé les neurones à se poser la question «qui sommes-nous ?». Continuons humblement son oeuvre mais dans un espace plus confiné : qui sont ceux qui vont à la Meinau ? Analyse sociétale et satirique d'une population bien

La première rencontre d'êtres insolites se fait dès les guichets du stade : on peut y voir comater des sortes de Bernard Lhermitte qu'on met dans un aquarium fissuré en béton, sans eau et sans air avec une vitre qui a dû voir toutes les guerres napoléoniennes, des tornades de poussière, des mains à 6 doigts (j'ai même cru voir des empreintes de pied une fois) et des haleines fétides d'avant-match . Et si votre horoscope du jour vous est favorable peut-être alors aurez-vous la chance de voir ou de sentir un sourire (la mauvaise hygiène dentaire n'étant pas l'exclusivité de ceux qui achètent des billets). Quelques centimètres plus loin, dans le même genre mais en semi-liberté cette fois-ci, on tombe sur les stadiers à l'entrée des grilles. A ne pas confondre avec les hommes en bleu estampillés « gendarmerie nationale », qui eux ont le droit de boire. Il faut reconnaître que nos chers stadiers dans l'ensemble sont bien polis et bien appliqués à laisser passer tout et n'importe quoi, mais en revanche très minutieux quand il s'agit de faire une fouille très poussée des mollets quand on vient en short... Les gros poilus des jambes sont prévenus : désormais ils ne pourront plus rentrer de fumigènes ou packs de Kro de cette manière-là. Il va falloir se rabattre vers d'autres zones à pilosité tout aussi prononcée.

Une fois entré légalement ou non dans la fourmilière, on a un choix pléthorique de sujets à analyser. Commençons par les optimistes maladifs qui basent leurs jugements sur des faits concrets et surtout immensément objectifs. Mars 2001, conan: « Mais non ! arrête donc !, c'est impossible qu'on descende en D2, le Racing c'est un club trop MYTHIQUE ! il peut pas descendre ! ». Août 2003 : (Conan toujours...) « il y a trop de points communs avec la saison du titre, moi je te dis que cette année on est champion, c'est sûr ! ». Et de l'autre côté il y a les éternels pessimistes résignés, prostrés et désabusés (marc) : « on va encore jouer le maintien cette année, c'est pathétique vraiment... ». Et il y a bien entendu les fameux Hans im Schnokeloch, ces éternels insatisfaits dotés d'un irrépressible besoin de protester. Ça grogne, ça ronchonne, ça vitupère (vous inquiétez pas, moi aussi je viens de découvrir ce mot) au moindre prétexte. Ça râle parce que ça a le soleil dans les yeux, et pourtant cela fait 10 ans que ça garde le même abonnement à la même place et cela fait juste quelques millénaires de plus que le soleil est là-haut au même endroit à la même période. Ça s'indigne parce que le kop fait du bruit ou alors n'en fait pas assez. Et on voudrait que ça chante sans qu'on ait soi-même à pousser des vocalises, ben oui on ne va pas s'abaisser à ça tout de même, c'est le boulot des roturiers. Et puis ça s'émeut parce que la sono du stade est trop forte et qu'on ne comprend toujours rien, sans parler des larsens et bruits aigus qui se confondent avec les cris effrénés et autres gloussements des groupies.

« Pascaaaaaaal !! Pontuuuuus !! Aleeeeex !! iddddd (non, ça c'est juste un fantasme) ». Le club est obligé de faire des rigoles dans les travées de la Meinau pour l'évacuation de liquide séminal. A l'époque de « Marco t'es l'plus beau ! » on faisait encore ça à la serpillière, on n'arrête pas le progrès... Le moindre toucher de balle est sujet à une hystérie boysbandesque qui peut découler sur deux issues possibles. Une fatale : des menaces de mort sur le joueur adverse qui a osé déposséder du ballon ce corps d'homme parfait tant idolâtré. L'autre plus hormonale qui se traduit lors d'un but par un orgasme collectif avec convulsions, spasmes et divers effets diluviens. Les mâles, les vrais, ne sont pas en reste puisqu'on peut les voir pleurer comme des madeleines (car une madeleine ça pleure, c'est connu..) à la moindre injustice (injustice = situation un tantinet non favorable à l'équipe sur laquelle on a jeté son dévolu).

A propos d'équipe qu'on chérit, il y a bien une espèce particulièrement détestable qui hante les gradins de la Meinau et celles d'autres enceintes, un mal typiquement français : les opportunistes si chers à Dutronc et à Ducon. En particulier, ceux qui sortent de leur terrier les jours de RCS-OM attendant la 89ème minute pour choisir de quel but de quel camp ils vont pouvoir se targuer sitôt le match fini. Ceux qui ont dans leur garde robe tous les maillots des grosses écuries susceptibles de remporter le championnat pour pouvoir se pavaner avec selon le classement de la journée. Ils ont dû être bien embêtés quand Auxerre a remporté le championnat en 1996. Prions ensemble mes frères pour un « Le Mans Champion de France » afin que leurs maillots si fringants et hauts en couleurs fleurissent dans nos tribunes...

Avec les joueurs qui ont fait l'histoire du club coule son flot de nostalgiques. Ces fossoyeurs de saisons révolues qui enjolivent au présent des joueurs sur lesquels ils déversaient leur bile pourtant dans le passé. Ainsi, Ismaël et « ses grandes jambes qui ne tiennent pas debout » devient « l'homme qu'il nous aurait fallu » et qu'on « a laissé filer au Werder puis au grand Bayern ». Et que dire de Gilbert Gress ? Le druide continue de faire parler ses disciples aveuglés par son aura, par le temps qui passe et qui contribue à le glorifier. Mais c'est oublier que la statue a subi de grosses fissures lors de ses dernières prestations (Metz, Neuchâtel et Zürich se souviennent encore de l'arrière goût de sa potion magique)...que connaissent parfaitement les intégristes du ballon rond. Véritables encyclopédies dans une enveloppe humaine, ces « Rain Man » en puissance connaissent tout sur le passé des joueurs, sur leur poids, le diamètre et la profondeur de leur nombril, le nombre de cheveux et ce qu'ils chantent quand ils sont sous la douche. Ils ont également dans leur cortex les données de toutes les compétitions des plus importantes aux plus obscures avec le nom des buteurs, des équipiers et même des remplaçants (détail toujours utile quand il s'agit de dégoûter une assemblée en suspend qui attend le moindre faux pas de l'orateur dans ce domaine). Mais cette faculté a un vice puisque la moindre faille peut les envoyer dans un désarroi des plus profonds, les privant de sommeil, de repas, de vie sociale qu'ils n'avaient déjà pas avant, au point que certains en sont désormais à apprendre par coeur les composants chimiques et dosages du Prozac (joueur tchèque ayant failli être sélectionné lors du fameux derby de 4ème division entre Lodiczan et Bryhowski).

Assurément, cette ethnie d'élite de la connaissance footbalistique et du fanatisme chiffré appartiennent à une galaxie différente du commun des mortels, tout comme l'est le gros beauf de base moustachu (non ce n'est pas un doublon avec les CRS dont j'ai voué les privilèges au début de l'article) que les journalistes adorent tant interviewer. Le beauf a cette faculté d'être incapable de proposer un autre score que 3-0 devant la caméra (la Coupe du Monde a fait ses ravages...) et de dire autre chose que « j'espère qu'on va gagner ». Vous l'aurez compris, sa force c'est son vocabulaire qui s'étoffe match après match. RCS-Auxerre : « enculé ! » RCS-Monaco « des enculés !» puis RCS-Bordeaux « bande d'enculés ! ». La progression sémantique est tout bonnement prodigieuse, vous en conviendrez. On dit même qu'au bout d'une saison entière certains (les plus fidèles) auraient déjà réussi à faire une phrase cohérente (avec un verbe, si si !), mais bon les rumeurs... Après ça, qui peut oser nier que le ballon rond est un vecteur d'émancipation personnelle et d'élévation spirituelle ? Enfin, le beauf a cette particularité de n'avoir aucune ligne de conduite cohérente. En effet, dans le même match il est capable de louer les mérites de l'entraîneur au point de vouloir partager sa canette de Kro avec lui (geste très fort chez le beauf) et au premier but de l'équipe adverse de vouloir lui balancer la télé à la figure (car le beauf est souvent très poilu et rentre tout ce qu'il veut dans un stade).

Mais il faut de tout pour faire un monde, et il faut de tout pour que le foot reste humain. Le Racing c'est pareil (attention ne faîtes pas le raccourci Racing = foot parce qu'il y a toujours des moments de l'année, notamment en hiver, où on se demande si c'est toujours du foot qu'on nous propose). Le Racing ça doit être un plaisir simple. Il suffit de repenser aux dribbles magiques d'Alexander Mostovoï, aux tacles propres de Frank Leboeuf dans la surface, aux coups francs victorieux de David Zitelli et aux nombreuses remontées du terrain tellement inutiles de Wilfried Gohel. Le Racing c'est des souvenirs, des émotions, des fragments de vies toutes différentes et c'est tous ces gens aussi : ces tribus des tribunes. Des portraits à peine exagérés, des clichés parfois justifiés, des personnages tout droit du Café de la Gare ou du Théâtre de Bouvard. Plus vraisemblablement du théâtre de la vie . Et on a beau se moquer d'eux, il faut bien admettre que les soirs de match, on leur ressemble tout de même un peu...

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  • tempest Quid de Guilbert, Delaine et Aholou en fin de saison ?
  • tempest puisque l'équipe 1 est une "équipe X" d'une world company du football
  • tempest On sait donc également que l'équipe 2 n'a pas d'avenir sous sa forme actuelle
  • tempest Au moins ceux qui s'abonnent le feront en connaissance de cause
  • tempest Pape Daouda Diong ... Bon et bien on connaît dorénavant la suite du projet
  • il-vecchio Si la Var dort la nuit l'avare se réveille à toute heure inquiet de la possible disparition de son or.
  • il-vecchio Tout ce qu'il ne faut pas faire sur un terrain. Catalogue partiel: [lien]
  • moderateur La VAR dort la nuit, et certains devraient en faire de même.
  • valdestras Exact, je me demande si c'est bien réglementaire tout ça. Gautier démission !
  • il-vecchio Et je constate que la Var s'est réveillée entre 6h43 et 7h00
  • il-vecchio Toi aussi? Faut dire qu'à 5h30 du mat' ça décille.
  • valdestras En tous cas ça m'a fait ma lecture du matin. C'est pas de la grande littérature mais ça manque pas de caractère.
  • valdestras Dites donc forum animé tard le soir, que fait la var??
  • takl et après on se plaint des fonctionnaires. Facile.
  • takl Kurzawa il a arrêté de courir à 25 ans, il a été augmenté à 29, depuis il en fout moins qu'un délégué du personnel
  • takl Les sportifs > la SNCF
  • takl d'ailleurs la retraite sportive à l'aube de la quarantaine, on en parle de ces privilégiés?
  • takl et même leur virginité pour certains
  • athor Il a 18 ans, ça ira donc
  • takl A 21 ans ils ont perdus leurs dents de lait, ça vaut plus rien

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