« Et c'est ainsi qu'Allah est grand »

Alexandre Vialatte concluait par un hommage au dieu de l'Islam toutes ses chroniques dans La Montagne, journal auvergnat s'il en est. Si le traducteur de Kafka officiait aujourd'hui aux Dernières Nouvelles d'Alsace, il pourrait ouvrir ainsi son compte-rendu du match Racing-Clermont. Non pas que la victoire strasbourgeoise fut chanceuse, mais bien parce que le scénario offert par la providence a permis aux joueurs de se retrouver avec, en prime, l'amorce d'une réconciliation avec les travées de la Meinau.

Le match débute de façon crispée, avec des Strasbourgeois tendus qui, visiblement, ont peur de commettre une énième bévue en début de match. Les Clermontois sont cependant peu dangereux et, dans l'ensemble, très timorés. Progressivement, les attaquants Strasbourgeois font parler leur technique supérieure sur le terrain humide où les contrôles sont difficiles et où les ballons fusent. A la 19ème minute, Jean-Alain Fanchone récupère un ballon au milieu de terrain, quitte son poste d'arrière gauche et, après un beau rush, sert son cousin qui crochète, revient son pied gauche et marque avec l'aide du poteau opposé (1-0, 19'). Très belle action du Racing qui score sur sa première réelle occasion. Trois minutes plus tard, Gargorov, bien lancé par Cohade, manque son face à face avec Fabre et, ce faisant, gâche une balle de break. Progressivement le jeu strasbourgeois s'installe et l'équipe devient plus sereine, les Clermontois étant toujours aussi discrets.

A la mi-temps, Didier Ollé-Nicolle recadre ses joueurs et n'hésite pas à dire franchement à la télévision ce qu'il a pensé du jeu de son équipe en première période. D'aucuns remarqueront qu'on aimerait bien voir à Strasbourg un discours aussi dépourvu de circonvolutions, ce qui n'est selon toute vraisemblance pas pour demain. Malheureusement pour le coach clermontois, ces vigoureuses paroles ne seront pas véritablement suivies d'effet puisque les coéquipiers du Cronenbourgeois Badiane peinent toujours autant à mettre en difficulté une défense du RCS pourtant loin d'être impériale.

A la 53ème minute, [lien=https://racingstub.com/referees/416/]M. Moreira[/lien] s'invite dans le match en expulsant Bezzaz suite à un pied haut sur Abdoulaye. Sur le plan du jeu, une telle action ne méritait même pas un jaune puisque les deux joueurs étaient à la lutte pour le ballon et que le geste de l'international algérien est parfaitement involontaire. Mais les nouvelles consignes de la Ligue obligent désormais les arbitres à prendre en compte la gravité de la blessure pour définir la sanction. C'est en vertu de la même politique que le Tourangeau Giroud fut expulsé suite à la blessure de Quentin Othon. Sévèrement ensanglanté, Abdoulaye revient pourtant sur le terrain quelques instants plus tard sans encombre, ce qui a le don de provoquer l'ire du public de la Meinau. Ce faisant, le stade se rabiboche avec son équipe. Un ennemi commun aide toujours à se réconcilier après une petite fâcherie.

Nerveux, les Strasbourgeois commettent des fautes et Shereni terminera même le match sur un carton orange très vif. Mais cette agressivité témoigne surtout d'une farouche envie de gagner et, bien que réduits à 10, les Strasbourgeois restent souverains et se créent des occasions en contre. Sur une de ces actions, Fanchone obtient avec brio un penalty indiscutable que Cohade se charge de transformer avec un peu de chance (2-0, 72'). Désormais franchement portés par leur public, les joueurs du RCS font une fin de match solide et livrent une de leur plus belles prestations sur le plan collectif depuis longtemps.

Sans vouloir tomber dans un Nietzscheéisme de pacotille, on ne pourra que constater que des circonstances de match qui auraient pu tuer le Racing – public boudeur, carton rouge sévère – ne l'ont rendu que plus fort. Le match de ce soir est donc très intéressant dans la perspective de l'ascension en Ligue 1, même si les concurrents ont également gagné. Une rencontre d'autant plus satisfaisante que certains joueurs clés en difficulté ces derniers temps ont retrouvé leur meilleur niveau. Ainsi, Jean-Alain Fanchone a parfaitement muselé Poté et a été l'auteur d'un match très intéressant sur le plan offensif, avec une passe décisive à la clé. Renaud Cohade, de son côté, fut au four et au moulin, récupérant et relançant sans relâche le jeu du Racing. Enfin, James Fanchone a été par deux fois décisif et confirme son retour en grâce après un doublé à Vannes la semaine dernière.